lundi 27 janvier 2014

LE PURGATOIRE DE LA HYPE



De son importation en France par Jean-François Bizot à Internet qui n’a pas été loin de l’achever, l’underground s’est durant 45 ans montré passionnant, rebelle, sectaire, snob, caricatural et ringard, avant d’être laissé pour mort. A tort. 

(article publié dans le Focus Vif du 24 janvier 2014)
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mercredi 8 janvier 2014

DEVIOUS, TRUCULENT & UNRELIABLE

J’ai passé la fin de 2013 et le début de 2014 dans une maison de campagne en plein milieu de l’Yonne, une région de champs, de grands ciels français et de petits villages ramassés sur eux-mêmes. Les routes n’y sont pas éclairées, sinon par les phares des voitures, ce qui la nuit, ne permet une visibilité que d’une trentaine de mètres devant soi. Le noir et la nuit ne m’ont jamais fait peur, même tout au fond des bois ou perdu dans les champs. Au contraire, cela me fascine. Seulement voilà, à chaque fois que l’on prenait la route la nuit tombée (et la nuit tombe à 17 heures en ce moment), j’ai durant cette dizaine de jours dans le trou-de-cul de la France toujours eu peur qu’un jeune homme blafard uniquement habillé d’un anorak d’enfant, pour le reste nu, ne surgisse devant nos phares. Et ça, c’est la faute à Morrissey!


Durant ces vacances, je me suis en effet avalé l’Autobiography de Steven Patrick Morrissey, parue en octobre chez Penguin Classics (?!?!!!?). C’est un drôle de bouquin, presque gênant à lire. Il charrie beaucoup de rancunes et laisse durant de trop nombreuses pages une impression de mensonge et de manipulation. C’est très amusant, même si peut-être faux et pas toujours mérité, quand Geoff Travis de Rough Trade, Siouxsie Sioux, Tony Wilson de Factory Records ou David Bowie s’en prennent plein la gueule. Cela devient par contre pénible, même malsain, quand plus de cinquante pages sont consacrées au procès ayant opposé Morrissey à Mike Joyce, le batteur des Smiths, ou qu’imbu d’une prétention démesurée, Morrissey rappelle la position dans les charts de chacun de ses singles, considérant que les plus mauvais n’ont pas percé non pas parce qu’ils sont mauvais mais parce que la maison de disque du moment ne faisait pas correctement sa promo. Morrissey semble par ailleurs un très mauvais juge de son travail puisqu’il avoue aussi avoir un moment considéré There is a Light That Never Goes Out comme une mauvaise chanson des Smiths!







Le juge James Weeks, chargé du procès en question, a dit de Morrissey que c’était quelqu’un de  “devious, truculent & unreliable”. Cela n’a pas plu au zygoto, qui lui en veut depuis à mort, se plaignant même que cette étiquette ensuite récupérée par des médias hostiles à son égard lui aurait entravé certaines possibilités de carrière. Le gros problème, c’est que la lecture de ce bouquin confirme plus qu’elle n’infirme cette sortie du juge Weeks. Evidemment que Morrissey est quelqu’un de “devious, truculent & unreliable” et évidemment que le fait même qu’il s’offusque de cette étiquette montre à quel point il s’est perdu en cours de route. Le Morrissey que j’aime et que je respecte, celui des années 80, comme je me l’imagine du moins, aurait joué de cette appellation. Il en aurait été très fier. Ce serait peut-être même devenu le titre de son livre. Là, cela fait juste ronchonner ce vieux con assis sur son paquet de chansons de variétoche dignes d'un Dave en anglais.


Et donc, au milieu des piques et des plaintes, il y a aussi cette histoire de fantôme assez sidérante. Peu après le split des Smiths, Morrissey raconte qu’il est allé se balader de nuit avec des amis sur la lande près de Manchester, les fameuses Saddleworth Moors qui charrient tant d’histoires macabres, dont l’affaire des meurtres d’enfants qui a inspiré l’une des premières chansons des Smiths. Au retour, sur une route sinueuse, le chanteur prétend que les phares de la bagnole ont soudainement éclairé, au milieu de nulle part, un jeune mec blafard, la bite à l’air, complètement nu, à part un anorak d’enfant sur le dos. Il n’y avait rien, strictement rien aux alentours. Morrissey et ses amis ont paniqué. Ils ont pensé que c’était un fantôme. Ou un accidenté de la route. Ou quelqu’un qui s’était échappé d’une cachette où il était retenu prisonnier par des pédophiles. Ou que c’était lui-même un pervers. Ou un blagueur ivre. Ou un type qui faisait mine d’être accidenté et que dès que vous vous arrêtiez pour l’aider, on vous assommait pour vous voler la voiture et vous laisser amoché et sans fric au milieu de nulle part. Morrissey a fini par appeler la police. Les flics lui auraient répondu qu’ils n’interviendraient pas. Que cela se passait sans arrêt au même endroit, qu’il n’y avait rien à faire, qu’ils ne trouveraient rien dès qu’ils seraient sur place. En d’autres termes, que le mec en anorak d’enfant était un fantôme. Et là, soit Le Moz se fout bien de notre gueule, soit il a vécu le truc le plus wtf du monde, mais le voilà qui prétend alors que le lendemain, en plein jour, ses amis et lui sont retournés sur les lieux. Et tout ce qu’ils y ont trouvé, dans les fourrés, c’est un caleçon!!!


Je trouve cette histoire nawak, grotesque, formidable. A cause d’elle, je ne serai plus jamais vraiment tranquille quand on roule sur des routes de campagne sombres la nuit. Pas que je crois vraiment aux fantômes. Plutôt aux connards capables de provoquer des crises cardiaques et des accidents pour le fun. That joke isn’t funny anymore.

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