Il
y a quelques jours, toujours en réaction à mon billet sur la RTBF DJ Experience et Quentin Mosimann, une fille a balancé sur Facebook
une sorte de lettre ouverte où elle appelait à travailler sur
l'image de la culture alternative, « perçue souvent par le
plus grand nombre comme étrange, bizarre, inaccessible, obscure ».
Elle avait trouvé mon papier marrant mais peu constructif, ce qui
est une critique qui revient souvent en travers de la tronche de mon
taf, depuis très longtemps, et que j'assume parfaitement. Plutôt
que de se moquer du grand-public, elle préférait de son côté
chercher à l'« initier, lui expliquer, lui montrer, lui donner
envie d'en connaître plus. » Bref, militer.
Okay,
ça peut être considéré comme l'un des grands rôles d'un
journaliste ou d'un chroniqueur culturel, du moins depuis que l'idée
dominante est celle d'un méchant mainstream mangeur d'enfants contre
lequel se battent de valeureux chevaliers wouachement zindépendants,
tu vois. Trop cynique pour cela, pas assez missionnaire non plus, ce n'est vraiment pas mon trip. En fait, je me fous totalement de la culture
ou du manque de culture des gens. Même si je me peux me montrer
hautain, moqueur et carrément méprisant à leur égard, je garde la plus grande clémence pour l'inculture crasse des barakis,
des beaufs, des cagoles et des crétins. Ils me donnent certes tous envie
de mourir, parce que l'image qu'ils renvoient du monde est tout
simplement infernale, mais je ne suis d'un autre côté pas
franchement certain qu'apprendre aux bambins à lire Tolstoï et à
jouer aux échecs dès la maternelle, comme cela a pu se voir sous
certains sinistres régimes du XXème siècle, serait préférable à
la liberté fondamentale de rester toute sa vie un parfait imbécile.
Comme
tout le monde, à titre personnel, je pense que certaines expressions
culturelles valent mieux que d'autres. Ce n'est pas quelque-chose que
je me refuse à partager mais contrairement à beaucoup de confrères,
à la croisade et à la conversion, soit bourrer le crâne des gens,
je préfère personnellement tenter de libérer les esprits. Mon
idéal, ce n'est pas un public manipulé pour aimer ceci plutôt que
cela. Mon idéal, c'est un public suffisament éduqué et malin pour
lui-même décider de quoi il nourrira son ciboulot et que cela soit
à base de Quentin Mosimann, d'Actress ou de Bon Iver, après, je
n'en ai franchement rien à foutre.
Ce
que je méprise par contre avec force, l'Adversaire véritable, ce sont les
systèmes. Quand se met en place un schéma qui aliène les gens, les
fanatise, les rend totalement dépendants de décisions et d'emballements qui ne sont
pas les leurs. C'est un système qui starifie (ou tente de starifier)
quelqu'un comme Quentin Mosimann et si ce système n'existait pas, ce
mec en serait sans doute toujours à faire des passes de tektonik sur
un parking de supermarché. Ce qui est vomitif, c'est que dans le
processus, on tire les gens vers le bas, on leur inculque de
véritables valeurs de merde, on les arnaque, on leur ment. Comme
vis-à-vis de tout système aliénant, la seule alternative valable,
c'est le mépris et la liberté totale d'y puiser ou non son bonheur, en connaissance de cause, pas la substitution par un autre système qui
serait à priori plus vertueux.
A
des degrés divers, je pense que la médiatisation de Mosimann,
Actress et Bon Iver fonctionne plus ou moins exactement de la même
façon. Critiquer tout cela, c'est donc un tout autre trip que le
très usé et pas bien passionnant « commercial versus
underground » ou « ma qualité contre tes goûts de
chiottes ». C'est moins une croisade qu'un travail de sape, du
sabotage rigolard à la Fight Club qui cherche bien à libérer les
gens, à les inviter à un très nécessaire recul mais tout en
privilégiant aussi le fun et la légèreté. Et après, quand le
streumon est mort ou son pouvoir de nuisance ringardisé et minimisé,
ils font ce qu'ils veulent, les gens. Sans quoi ça vire totalement
fasciste. Bref, comme gueulait Graham Chapman dans Life of Brian : « I
AM NOT THE MESSIAH ! NOW FUCK OFF ! ». Plus qu'un
film, un mode d'emploi.
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