L'autre
jour, je me suis rendu compte que je n'avais absolument aucune idée
de ce que devenaient The Subs. Il n'y a pas très longtemps, je les
ai bien vu prendre le Concorde avec Jean-Pierre Castaldi mais cela
fait sinon des lustres que je n'ai pas vraiment entendu parler d'eux
et, pourtant, tout roule
: ils n'ont pas loin de 21 000 fans
répertoriés sur Deezer, plus de 97 000 sur Facebook, sortent des
maxis plus vite que Charles Michel une grosse connerie, tournent à
gauche, à droite, et en sont déjà à leur troisième album. Perso,
j'ai perdu leur trace et pas mal d'intérêt à leur égard à partir
de The Pope of Dope, enregistré avec les Party Harders en mode Wa Wa
Wa Wallifornie, selon mes propres critères, une abomination totale.
A leurs débuts, j'aimais pourtant bien les Subs. Je trouvais que ces
mecs étaient même dans un trip musical assez incroyable, qui
consistait à fabriquer des bombes de dancefloors de très bonne
qualité à base de tout ce que la dance-music a fait de pire : la
trance de kermesse, la rave-music d'auto-scooters, la new-beat la
plus déplorable, les effets « klaxons de foot »...
Comme
Daft Punk, les Subs semblaient fouiller les poubelles et les
brocantes de l'histoire de la dance-music pour en tirer des sons à
recontextualiser dans des productions certes toujours bien cheesy
mais fédératrices et efficaces, de facture très professionnelle,
en soi rigolotes mais aussi là pour être prises avec un certain
sérieux. Au contraire de Daft Punk, par contre, je n'ai jamais eu
l'impression qu'il y avait chez The Subs la moindre prétention. Ce
qui n'est jamais négligeable dans un monde aux chevilles aussi
enflées que celui de la production electro.
Jeroen
De Pessemier, rebaptisé Papillon était chanteur chez Foxylane, un
groupe rock flamand ayant connu son petit succès, avant de lancer
The Subs avec deux DJ's gantois alors connus sous les noms de Starski
et Tonic. La Flandre a assez vite aimé et soutenu ces petits
poulains -version plus jeune, plus sale et plus rave de Soulwax- qui
se sont retrouvés sur une base régulière dans à peu près tout ce
que le Nord du Pays compte comme clubs et festivals. Un brin
putassiers, pas le moins du monde finauds, ils n'en étaient pas
moins bons, meilleurs même que Justice avec lesquels ils
partageaient cette idée très à la mode il y a 8 ou 9 ans : coller
à la dance-music une attitude rock, exagérément rock, jouer au
Motley Crüe de catalogue 3 Suisses. C'est ridicule, grotesque même,
mais ça fout une ambiance et une patate de feu.
Subculture,
le premier album des Subs, tient presque plus de la compilation de
maxis sortis depuis 2006, entrecoupée de fonds de tiroir, que de
quoi que ce soit d'autre mais cela reste selon moi ce que le groupe a
fait de mieux. Les locomotives du disque, dont certaines étaient
déjà assez anciennes à la mise sur le marché du LP, ont pour
titres Fuck That Shit, Kiss My Trance et Music is The New Religion et
sont de véritables pièges à blind-tests. Ca sonne en effet comme
des vieilleries du début des années 90, qu'aurait pu sortir le
label R&S, et c'est bien ce qui rend ces morceaux imparables. Ils
sont intemporels, ultra-efficaces, peuvent s'apprécier autant des
bourrins et des barakis que des petits connaisseurs pour qui la
meilleure dance-music n'a vraiment que foutre des notions de bon et
de mauvais goût, du moment que ça fait lever les bras sur un
dancefloor. En fait, ces titres sonnent comme des classiques, peuvent
se mixer ou s'enchaîner très naturellement à des hymnes
électroniques à la fois très populaires et néanmoins foncièrement
bons comme le Go de Moby ou le Hey Boy Hey Girl des Chemical
Brothers. Ce n'est pas de la minimale hambourgeoise à apprécier
entre membres de la même secte, c'est du gros boum boum fédérateur
sans être (trop) crétin, réussi selon les préceptes d'une
alchimie aussi rare qu' hasardeuse, peut-être bien un peu magique.
Ajoutons à cela que Subculture contient encore une reprise de
Prodigy bien meilleure que l'originale (ce qui n'est pas très
difficile, mais bon...) et le dossier semble plié : il ne faut pas
spécialement être jeune flamand du Pukkelpop avec son bermuda
Zeeman, sa boîte à tartines au filet de dinde et un gros Bart
Simpson fondu sur la glotte pour kiffer les débuts The Subs. Après,
c'est une autre histoire...