lundi 25 juillet 2011

MAMY BINOUZE


Je regarde mes disques, toute la collection, et j'y vois de gros paquets de came. De gros, gros paquets de drogues. Des pacsons énormes, des montagnes à la Montana. Ecstasy, ganja, coke, heroïne, crack, speed, Sassi, colle et même les cendres à papa, puisque j'ai quelques albums des Rolling Stones. Je regarde mes disques et il n'y en a pas un seul qui ne soit pas l'oeuvre de défoncés notoires. Pas un. Il y a dans le tas des morts, des vivants, des junkies, des richards, des fêtards, des crevards, des losers, des superstars, des noblions et tous se sont envoyés dans le pif ou les veines des tonnes et des tonnes de défonce. Certains ne s'en sont jamais caché, d'autres se sont montrés à ce sujet plutôt discrets et même très hypocrites. Certains ont écrit des bouquins sur leurs dépendances, ont vu leur attrait pour la came faire l'objet de films, de conférences, de mémoires. D'autres sont réputés clean depuis 10 ou 20 ans, pourquoi pas... A part Pete Doherty et Amy Winehouse, je n'en vois toutefois pas beaucoup dont les planantes ont fait l'objet d'un tel acharnement médiatique, ont généré autant de commentaires désobligeants, de curiosité malsaine, de débordements tabloïdes.

J'ai le souvenir d'une époque où les addictions des stars n'étaient révélées qu'après leur décès, parfois même pas avant des années. On dira que c'était pudique et hypocrite. J'ai le souvenir d'une autre époque où la défonce était vue comme une arme revendicatrice, une mode immanquable, une affirmation de soi. On dira que c'était irresponsable et plutôt con. Troisième chapitre : là, maintenant. Jugement négatif, anonyme, définitif, expéditif. On dira que c'est la liberté d'expression, la démocratie directe, et que les années que nous vivons sont moins libertaires et permissives qu'avant. Peut-être. Sauf que, fondamentalement, avant d'en arriver au verdict moral, il ne s'agit que de hiérarchisation de l'information. Décider si Amy Winehouse était une diva soul plutôt douée accessoirement camée jusqu'aux oreilles ou si Amy Winehouse était une junkie notoire accessoirement plutôt douée pour la soul.

Loin de moi l'idée de lancer la tarte à la crème de la responsabilité collective, vouloir que la Chantilly vise surtout les médias. Ce n'est pas du tout mon propos, pour une fois. Amy Winehouse est morte de junkitude. Point. Je me fous de son rapport à la presse, qui peut se résumer par du marketing malsain parti en sucette, des portes sciemment laissées entrouvertes là où une batterie de cadenas s'imposait. Ce qui m'intéresse ici, ce n'est même pas sa carrière, son parcours ou son art, que je n'ai suivis que de très, très loin. En fait, comme souvent à l'occasion de l'enterrement de personnalités borderline, je scrute les réactions des survivants. Et je vois de la veulerie. Se révéler autour du cercueil le gros connard, l'enculé néo-con, le péquenaud de compète, le nivelleur pas le bas. Le Schtroumpf à Lunettes y va de sa petite leçon : quand on brûle la chandelle par les deux bouts, voilà ce qui arrive, ragnagna. Au bar, cela parie sur le probable temps de survie de Pete Doherty. Aux gogues, autour d'un pétard, la famille Wiki discute de l'admissibilité d'Amy Winehouse au Panthéon de la Chanson : c'est qu'elle n'a pas sorti beaucoup d'albums, foiré pas mal de concerts. Sa vie n'est pas un exemple pour la jeunesse.

A n'importe quel autre moment de l'année, j'aurais éventuellement pu trouver tout cela complètement crétin mais néanmoins très drôle, comme du Jérôme Delvaux des bons jours, du cirque à la Zemmour. Le week-end où un gros con de troll dégénéré est sorti de la no-life du web pour décimer des charrettes entières d'innocents dont la vie lui paraissait ne rien valoir, représenter l'exacte antithèse de ses propres valeurs morales, cela donne par contre juste un gros goût de merde à la salive.

3 commentaires:

  1. non, de GROSSE merde à la salive.... Allons ! allons! la précision est de mise, que diable!

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  2. Ma soeur psychiatre et mélomane m'expliquait que les tendances narco-alcooliques des rockers, jazzmen, pop&rollers trouvent leur origine dans la maniaco-dépression dont ils sont souvent affligés.

    Compenser l'aridité de la phase dépressive et tenter de retrouver la créativité de la phase maniaque, par l'ingestion d'une ribambelle de substances.

    Vous avez d'ailleurs utilisé le terme "borderline". A dessein ?

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  3. A dessein, oui mais sans vraiment penser à la signification médicale, l'utilisant plutôt comme homonyme de "pas vraiment le tout venant" ;-)

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