jeudi 21 février 2013

LE DECLIC DE LA TYRANNIE



L'autre jour m'est tombé sous les yeux un exemplaire de Ciné-Télé Revue où, le temps d'une interview exclusive, Laeticia Delhez se plaint que sur Facebook, elle se fait souvent basher par des trolls du net du fait de ses tenues légères, aux bras nus. Certaines personnes semblent estimer que si peu de tissu, c'est indécent sur une femme ayant été violée, et ne se privent pas de le faire savoir sur les réseaux sociaux.

Ma première réaction, ça été : putain, on va où là ?

La deuxième, de me demander pourquoi diable Laeticia Delhez s'affiche sur Facebook en mode public ?

La troisième, de me rendre compte que de lui reprocher ses bras nus et de ne pas cadenasser ses profils on-line, c'est fondamentalement kif-kif-bourricot. C'est lui interdire une vie normale, décider à sa place ce qui est mieux pour elle. Le déclic de la tyrannie.

Dans ce contexte chargé où les torchons belges en refont des tonnes et des tonnes bien putassières sur l'Affaire Dutroux, m'est aussi tombé sous les yeux ce que je pense être l'une des choses les plus traumatisantes, intelligentes et marquantes de ces dernières années : White Bear, le deuxième épisode de la seconde saison de la série  britannique BlackMirror, peut-être carrément le meilleur du lot, même si la qualité d'ensemble est tellement exceptionnelle qu'il est dur de trancher. Le rapport avec Dutroux, les vindictes populaires sur réseaux sociaux et le cirque médiatique qui perdure depuis 15 ans est évident mais l'expliquer ici serait dévoiler un twist final complètement ouf, carrément pervers, bien qu'au fond très humaniste. Cet épisode peut ressembler à un remake de film apocalyptique, du Prix du Danger, de La Traque, voire même tenir du torture porn. Ca n'en reste pas moins la critique la plus acerbe des lynchages symboliques modernes qu'il m'ait été donné de voir. Et ça donne juste envie de fermer sa gueule plutôt que de jouer la carte de l'empathie envahissante et de la tyrannie du bien sur le web. Ou celle de la vindicte, du soutien de la punition ultime. De ne pas participer à ce cirque malsain, en tous cas.